jeudi 1 mars 2012

Le Pont assassiné Hubert de Maximy





L'auteur Hubert de Maximy a pris pour décor le Paris de la Renaissance, un épisode crucial dans la vie des parisiens du 15ème siècle : l'effondrement du pont Notre-Dame situé entre le quai de Gesvres (Rive droite) et le quai de Corse (Ile de la Cité) pour les besoins d'une nouvelle enquête menée par son personnage fétiche  : Gilles Trempenneur, chirurgien barbier au visage marqué par la variole ce qui lui vaut le surnom du "Grêlé".

L'écroulement des maisons du Pont Notre-Dame en 1499.
Tableau de Hubert Robert (XVIIIe s.).



Revenons à l'histoire du pont Notre-Dame :

Le 31 mai 1413, Charles VI pose le premier pieux de la construction du pont Notre Dame. Ce pont en bois, mesurait 106m de long, sur 27m de large fut achevé en 1421. Il était célèbre pour ses armureries et ses librairies, car comme beaucoup de ponts à cette époque il portait 60 maisons, trente de chaque côté, toutes semblables . Hélas le 25 octobre 1499, malgré les avertissements d’un charpentier, il s’effondre brutalement entraînant les soixante maisons dans sa chute. Ce fut une épouvantable catastrophe ! Le prévôt des marchands Jacques Piedefer, les échevins Antoine Malingre, Louis du Harlay, Pierre Turquant et Bernard Ripault, furent rendus responsables et finirent leurs jours en prison.

Partant d'un fait réel, l'auteur va mêler la réalité à la fiction et nous entraîner dans les bas fonds de la capitale jusqu'aux arènes clandestines ou la pègre et les grands seigneurs parient sur des combats d'anivaux sauvages, d'hommes et d'enfants recueillis par un dénommé Mains-Fortes.

"Quelle est l'histoire de cet hommes aux yeux transparents, à la silhouette étrange ? Il ne semble pas riche, pourtant on pariait gros,chez lui , la nuit dernière. Il vit hors la loi puisque paris et jeux d'argent sont interdits."
 
Mains Fortes est persuadé que le pont a été assassiné. Il ne s'agit pas d'un accident mais d'un acte prémédité. D'ailleurs, son fils adoptif est mort dans la catastrophe. Lui reste Flore, une jeune fille qui ne vit que pour la vengeance ...
Flore vêtue en damoiseau. Cette jeune femme énigmatique dont le visage n'est pas sans lui rappeler celui d'un tableau. "Une étrange vestale, toute de pureté et de violence sourde" dont il va s'éprendre.


Escroquerie, chantage, preuves falsifiées, assassinat... Folie aussi. Gilles le Grêlé cherche la vérité avec acharnement. La vérité qui  le conduira jusqu'à un puissant échevin qui manipule tout une population de laissé-pour-compte.


" Il est de ceux qui effraient. Les malandrins, inquiets, hésitent à barrer son chemin."

Ses proches l'assistent : Pauline, sa petite servante de douze ans (celle qui voit tout et qui ne devrait pas voir); Isengrin Crocq, le « commissaire examinateur » du quartier, un renard qui sait faire éclater la justice sans jamais se mettre en danger face à un pouvoir corrompu ; maître Grattenote enfin, vieux notaire à l'esprit fort vif...
 
Quelle manoeuvre, quelle vengeance a pu mener à une telle tragédie? 500 blessés, un millier de morts. Le sang, les cris, les larmes mais aussi les sentiments amoureux ponctuent cette nouvelle enquête du chirurgien barbier au grand coeur.
 
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Cette enquête est rythmée par la signature sonore des cent clochers que comptent Paris.
Matines : trois heures après minuit : les moines veillent en prière. Dans les rues de Paris, on trouve au petit matin des imprudents assassinés. On tue encore pour un manteau de laine.
Lorsque s'allongent les ombres, monte le désir de l'errance et nous suivons le chirurgien barbier dans les dédales du Paris de la Renaissance. Nous respirons avec lui "l'air humide aux senteurs animales,inimitable parfum de Paris la Superbe".
 
 
Avec plus de 200.000 âmes, la capitale est surpeuplée, on s'entasse jusqu'à 5 par pièces sur des maisons de 4 étages et plus... 
"les jours chômés, ils sortent comme des escargots après la pluie" (...)
 
L'ascenceur social n'a pas encore été construit et la France d'en bas peine à se hisser au minimum vital. Hubert de Maximy nous décrit ces enfants abandonnés à la naissance sur les parvis des églises et que l'on vend à l'âge de 5 ans comme "domestiques" quand ils ont eu la chance de vivre jusque là...
 
Si Gilles Trempemeur est un fameux détective pour son époque, il n'en est pas moins chirurgien et le lecteur apprend beaucoup sur les techniques chirurgicales de la renaissance.
 
Un roman bien documenté qui vous tient en haleine du début à la fin. L'écriture d'Hubert de Maximy est un véritable plaisir de lecture. Je suis impatiente de retrouver Gilles Trempemeur dans une nouvelle enquête !


Le Pont Assassiné
Roman broché
Eds De L'Archipel 
janvier 2012

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